DÉFENSEUR·E

Un épisode particulier a marqué la vie de Sylvie en tant que défenseure des Droits Humaines. Car, déterminée et courageuse, elle a cherché à défendre non seulement ses droits, mais aussi ceux d’un autre camarade injustement emprisonné, victime des politiques répressives de contrôle de l’immigration.

13 décembre 1983
Senegal
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SYLVIE AGNES SAMBOU

Sylvie a survécu à un naufrage. Son embarcation a dérivé pendant dix jours dans l’Océan Atlantique et huit de ses compagnons de route ont perdu la vie. Les survivants, après des jours sans boire ni manger, ont eu la chance d’être repérés par un bateau. Secourus par des hélicoptères du Sauvetage en Mer, ils ont réussi à atteindre les îles Canaries le 11 mars 2015. Mais le calvaire ne s’est pas arrêté là : Sylvie a été enfermée pendant cinquante-six jours dans un centre d’internement pour étrangers jusqu’à ce qu’elle soit libérée et transférée à Bilbao avec une ONG qui lui a apporté son soutien. Sylvie n’est pas une criminelle mais une victime d’une « terrible tragédie ». Cette période d’enfermement, elle la définit comme « 56 jours d’horreur que je n’oublierai jamais ».

Une fois libérée et après avoir retrouvé son calme, elle nous a révélé que pendant son séjour au CIE, elle avait reçu des pressions pour qu’elle désigne et dénonce un « prétendu capitaine » du bateau. Elle a affirmé que les autorités lui avaient promis qu’elle obtiendrait « des papiers » et même une maison si elle inventait cette fausse histoire au sujet de son partenaire. Suite à son refus, elle a reçu des insultes et subi des humiliations. Néanmoins, elle n’a pas cédé au chantage. Mais elle n’a pas pu empêcher qu’un autre survivant de la tragédie, qu’elle connaissait depuis longtemps, soit accusé de « trafic » et incarcéré. Elle savait qu’il n’était pas coupable car ce garçon n’avait rien à voir avec un quelconque réseau de trafiquants. Sylvie était convaincue que, ne parlant ni français ni espagnol pour se défendre, il avait été victime d’une confusion délibérée. « La police nationale espagnole voulait mettre la main sur un trafiquant et elle a accusé la personne qui avait le plus de difficultés à communiquer”.

Malgré tout ce qu’elle a vécu, sa situation précaire et les menaces qui pesaient sur elle, Sylvie a décidé d’aider à rétablir la justice : accompagnée de son avocat, elle s’est rendue au tribunal de Bilbao pour témoigner en faveur de son camarade accusé. Grâce à son intervention, le jeune homme a été libéré.

Aujourd’hui, Sylvie vit au Pays Basque et se bat pour élever son jeune garçon. Elle explique que si elle a pu arriver jusque là, c’est parce qu’elle se sentait protégée et confiante face à l’adversité. La communauté des migrants l’a présentée comme un tremplin pour la défense des droits.

« Malgré la situation précaire et la violence que nous subissons aux frontières, nous, les migrants, nous devons nous lever pour défendre dignement nos droits. Quitte à en assumer les conséquences ».

Lire l’article (en espagnol) dans le rapport ‘Tras la Frontera’ (Caminando Fronteras, 2016)