Caminando Fronteras renforce son travail sur la route des Baléares face à l’augmentation des arrivées et aux défis en matière de droits humains

Au cours des derniers mois, les îles Baléares sont devenues la route migratoire la plus active d’Espagne, en particulier depuis le printemps dernier. À Caminando Fronteras, nous suivons de près ces évolutions et leur impact sur les droits humains.

Notre travail s’est concentré sur l’analyse des conditions d’arrivée et d’accueil des personnes migrantes à Ibiza, Formentera et Majorque. La diversité des profils augmente, avec une présence notable de personnes originaires de la Corne de l’Afrique, notamment de Somalie et du Soudan du Sud. Cette nouvelle réalité représente un défi majeur pour la protection des droits humains dans la région, en particulier pour le droit d’asile.

Afin de renforcer la coopération et de favoriser l’échange d’informations, nous avons tenu des réunions avec des institutions publiques à Ibiza et Formentera, notamment avec les autorités responsables des migrations et de la protection des mineurs. Ensemble, nous avons abordé la situation actuelle et les principaux défis liés à la garantie des droits et de la dignité de toutes et tous.

Nous avons également participé au colloque organisé autour de l’exposition “Històries de migracions. Eivissa i Formentera, terra de sortida i arribada”, où notre collègue Maroan Fartahk a évoqué le passé et le présent des migrations, en soulignant leur caractère humain et continu.

En collaboration avec l’Université des Îles Baléares et sa Faculté des sciences infirmières, Caminando Fronteras a également contribué à la micro-accréditation universitaire « Prise en charge des personnes migrantes à leur arrivée », centrée sur la santé et l’accompagnement des personnes nouvellement arrivées sur les côtes. L’événement a réuni notre équipe, des enseignants universitaires et des professionnels de la santé, dont un médecin venu des Canaries, qui a partagé des bonnes pratiques mises en œuvre sur ce territoire.

Parallèlement, nous poursuivons notre accompagnement des familles de personnes décédées ou disparues sur la route des Baléares. Ces derniers mois, nous avons visité les cimetières de Sant Josep, Sant Jordi, Sant Francesc, Sant Agustí et Formentera, où nous avons constaté une augmentation préoccupante du nombre de corps retrouvés — la plus élevée à ce jour.

Ces visites ont mis en évidence les difficultés à garantir des sépultures dignes, la disponibilité d’espaces pour les personnes de confession musulmane, ainsi que la présence de nombreuses tombes anonymes, soulignant la nécessité urgente de soutenir les familles dans la recherche et l’identification de leurs proches.

À Caminando Fronteras, nous réaffirmons notre engagement en faveur de la vie, de la dignité et des droits humains. Nous nous tenons aux côtés de celles et ceux qui arrivent sur nos côtes, ainsi que des familles qui continuent à chercher celles et ceux qui n’ont pas pu le faire.

2 390 personnes migrantes ont perdu la vie en 2022 lors de leur voyage vers l’Espagne

Nous publions le rapport annuel de suivi des personnes migrantes qui meurent au cours de leur voyage migratoire vers l’Espagne par la Frontière Occidentale Euro-Africaine : Droit à la vie – Année 2022. Ce travail, préparé par l’Observatoire des Droits Humains de notre collectif, montre la tendance de plus en plus dangereuse des routes migratoires ces dernières années.

2 390 personnes ont perdu la vie l’année dernière. Ces chiffres, légèrement supérieurs à ceux de 2020, s’inscrivent dans la tendance d’une augmentation des décès au cours des cinq dernières années sur toutes les routes, maritimes et terrestres, vers l’Europe via l’État espagnol. Au sein de cette tendance, il convient de souligner l’exception de 2021 comme année fatale où 4 639 personnes sont décédées, liée au choc de l’augmentation exponentielle de l’utilisation de la route des Canaries.

Une fois encore, la route entre les côtes occidentales de l’Afrique du Nord et les îles Canaries se distingue comme la plus meurtrière, avec 1 784 victimes. Dans ce rapport, le collectif Caminando Fronteras analyse une liste de conséquences des politiques migratoires qui entravent, obstruent ou omettent de mettre en œuvre des mécanismes de sauvetage de la vie des migrants.

Le collectif a été témoin d’un cas flagrant de violation transnationale des droits à la frontière terrestre entre Melilla et Nador, où le 24 juin, 40 personnes ont perdu la vie dans un événement qui a impliqué l’utilisation de terribles moyens de dissuasion par les forces de police espagnoles et marocaines, y compris des balles. Sept mois plus tard, à la fin de l’année 2022, le ministère public espagnol a clos l’enquête sur cette tragédie et a indiqué que ni les actions des agents ni les refoulements ne présentaient de preuves d’un crime. Le rapport dénonce l’impunité de cette affaire, ainsi que la violation systématique des droits humains des deux côtés de la frontière pour les victimes et les survivants de la tragédie.

Ce travail met en évidence l’invisibilisation systématique de la route de l’Algérie, entre les côtes du nord de l’Algérie et le Levant espagnol et les Baléares, dans laquelle au moins 75 personnes ont perdu la vie en 2022. Le retard dans le signalement des bateaux manquants, associé à la distance et au danger de la route et à l’omission des sauvetages, place les migrants d’Algérie et leurs familles dans une situation de vulnérabilité particulière.

La plupart des victimes des routes migratoires meurent sans que leur corps ne soit jamais retrouvé (91,42%), ce qui a un impact terrible sur leurs familles et leurs communautés d’origine en raison de l’impossibilité de faire leur deuil et des implications juridiques et psychologiques.

Ce rapport met également en évidence la violence différenciée subie par les femmes et l’enfance migrante et expose le nombre de décès en 2022 : 288 femmes et 101 enfants.

Le rapport Right to Life Monitoring 2022 est publié un mois après l’étude longitudinale que nous avons menée sur les violations des droits humains à la frontière ouest euro-africaine entre 2018 et 2022. Les deux études sont disponibles en espagnol, catalan, français et anglais.

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